Accompagnement réalisé entre le 14 décembre 2023 et le 14 mars 2024.
Auprès des artistes :
Lou Chenivesse [ Assistant Décoration – Soutien technique – Script ]
Emilien Dubuc [ Assistant Image ]
Robin Touchard [ Soutien technique ]
Au Fresnoy-Studio National des arts contemporains
DNSEP 5ème année – filière Art.image
École supérieure d’art | Dunkerque-Tourcoing
Avant de relater de cette expérience professionnelle, il est important pour moi de débuter par des remerciements sincères. Je souhaite tout particulièrement exprimer ma profonde gratitude à Lou Chenivesse, Émilien Dubuc et Robin Touchard, artistes qui m’ont accompagné avec patience et pédagogie tout au long de cette immersion. Mes remerciements s’adressent également aux trois équipes que j’ai intégrées durant ces tournages, spécialement à Elodie Wattiaux, chargée de production et Aurore Toulon, cheffe opératrice pour ses conseils tout au long des tournages.
Je tiens à remercier Nathalie Stefanov, responsable de la filière Art.image, pour ses précieux conseils, ainsi que toute l’équipe de l’École supérieure d’art | Dunkerque-Tourcoing et celle du Fresnoy, dont la formation a rendu possible la collaboration entre ces deux institutions. Un grand merci également à Eric Prigent, qui a toujours veillé sur les étudiants de la filière Art-image, nous offrant sa confiance et un accès privilégié au Fresnoy. Cette expérience professionnalisante n’aurait pas pu se concrétiser sans leur soutien.
Contexte :
Cette expérience s’est inscrite dans le cadre du master préparatoire au concours du Fresnoy, en 5ème année de l’École Supérieure d’art (filière art-image). Ce fut une opportunité unique d’intégrer le Fresnoy, un lieu reconnu pour sa synergie entre arts visuels et technologies contemporaines. Après plusieurs mois de réflexion et des échanges enrichissants avec les artistes des promotions Vera Molnár (1ère année) et Claude Lévi-Strauss (2ème année), j’ai décidé de concentrer mon travail sur trois artistes : Lou Chenivesse, Émilien Dubuc, et Robin Touchard. Chaque projet a suscité en moi un intérêt particulier, avec une priorité accordée à celui de Lou Chenivesse. Cette expérience s’est déroulée entre le 14 décembre 2023 et le 14 mars 2024.
Un temps suspendu dans la vie de Lou Chenivesse
« Le Temps Suspendu » est une film hybride qui mélange trois sources de visuels : des archives, des images tournées en direct et des tableaux en 3D composites. Le film évoque un double récit : le décès de la grand-mère de Lou Chenivesse et l’histoire d’une ville engloutie par la pluie. Ce parallèle entre la perte personnelle et la catastrophe environnementale a immédiatement résonné avec mes propres recherches sur le lac Titicaca, un lieu sacré marqué par la présence du roseau (le junco). Le choix des symboles et des images dans ce film m’a donc profondément touché, renforçant mon engagement dans le projet.
Rôles pendant le tournage :
- Assistant décoration : Sous le regarde de Cloé Brochard, cheffe décoratrice, mon rôle était de veiller à ce que chaque détail scénographique et que chaque goute d’eau soit en harmonie avec la vision de l’artiste, notamment en studio où l’environnement devait se passer sous l’eau.
- Soutien technique : J’ai aidé l’équipe technique, particulièrement la chef opératrice Aurore Toulon et son assistante lumière Diana Hegazy, pour ajuster les éclairages et les cadrages, essentiels à l’esthétique voulue dans le tournage en extérieur.
- Chargé du Script des prises : La prises de notes de chaque plan tourné a été une tâche de concentration, écoute et intégration avec l’équipe. J’ai beaucoup aimé documenter, être présent par la captation vidéo et/ou prises de notes.
Déroulé du projet :
Pré-tournage sur le plateau studio
Les images réalisées en studio visaient principalement les « scènes-tableaux », où les personnages sont plongés dans un univers aquatique, immergés sous l’eau. Pour cela, l’équipe a décidé de tester des prises de vue au ralenti, en augmentant la cadence de 24 images par seconde à 100, voire 200 images par seconde.
9-11 Février 2024 – Tournage sur le plateau du Fresnoy
10 février 2024, tournage de deux scènes tableau (Draps + danse de couple)
11 février 2024, tournage de trois scènes tableau ( Objets sur la table, famille à table, captation des objets en 360 pour composite )
Lors du tournage en plateau, mon rôle principal était d’assurer le bon fonctionnement des pompes à eau pour chaque personnage à l’image. Cette tâche impliquait de maîtriser la puissance du moteur de chaque pompe, la longueur des tuyaux, la quantité et la distance de l’eau, ainsi que sa température. Il fallait également dissimuler les tuyaux entre les cheveux des acteurs.
Cette expérience a enrichi ma compréhension et la conception de ma pièce Cry of the Inti, où j’utilise une pompe à eau dissimulée dans une tige de roseau. L’utilisation de l’eau sur un plateau n’est pas une mise affaire, mais grâce à la communication et à la vigilance de l’équipe technique, nous avons réussi à atteindre nos objectifs et à créer de magnifiques images “sous l’eau”.
18-21 Février 2024 – Tournage en extérieur à Préfailles, Loire Atlantique
19 février 2024, tournage des scènes de la maison, terrasse et dans le salon
Lors du tournage en extérieur, mon rôle est devenu plus polyvalent, prêt à soutenir les techniciens, notamment du côté image mais également en script. Nous avons bénéficié d’une météo sombre et humide, idéale pour l’atmosphère recherchée. Bien que la lumière naturelle soit faible, elle présentait l’avantage de rester constante pendant les journées de tournage. Ce choix a facilité le travail des techniciens en matière de compensation lumineuse et a permis de mieux protéger les équipes audiovisuelles.
Une lettre organique à Mado de Emilien Dubuc
« Odamado » est un projet documentaire et expérimental qui s’ancre dans le domaine de la biotechnologie et de la compression numérique. Émilien Dubuc souhaitait explorer la possibilité de stocker des images dans des codes ADN, en utilisant un algorithme pour convertir des images numériques (format Webp, Webm) en codes ACGU, les bases de l’ADN. Ce concept novateur m’a immédiatement captivé, car il fusionne science et art pour créer une nouvelle forme de narration cinématographique.
Ces mêmes questionnements m’ont traversé l’esprit lors du développement de « LifestreamDay« , un projet documentaire de stockage numérique à long terme. Avec actuellement 9 To de souvenirs archivés en quatre ans sur un disque dur de grande capacité, je m’interroge sur la longévité de cette matière hybride, mi-plastique, mi-métallique, qui préserve ces traces. Et si, à l’avenir, la solution était de les stocker dans une matière vivante ?
En échangeant avec Émilien, j’ai réalisé que ma pièce Typha Latifolia — qui explore la mémoire inca contenue dans la sève d’un roseau — ne pouvait plus rester au stade de la métaphore. Cette plante pourrait devenir un véritable objet d’étude pour le stockage d’information audiovisuelle.
« Cette molécule ultra dense – 1 gramme d’ADN peut contenir 450 millions To – est à la fois stable et pérenne » […] « Stockée dans un environnement favorable, sa durée de vie peut dépasser les 100 000 ans, et une fois synthétisée, elle peut être conservée sans apport d’énergie, donc sans émettre de carbone. »
Stéphane Lemaire, cofondateur de Biomemory et directeur de recherche au CNRS
Rôles pendant le projet :
- Assistant Image : J’ai été en charge de réaliser plusieurs tests d’images en vue de leur conversion en codes ADN, travaillant directement sur un algorithme en python mis en place pour le film. Ce travail m’a permis de contribuer à la réflexion sur la façon dont l’image peut être traduite dans une molécule vivante, brouillant les frontières entre le tangible et l’immatériel.
Participation : du 5 au 7 février 2024 et du 5 au 7 mars 2024
Calendrier du projet
Je me suis consacré à ce projet par la recherche visuelle et exploration de la compression / mutations / décodification des images d’archives. Cela m’a ouvert des perspectives inédites, où la mémoire des images prend une nouvelle forme, littéralement vivante, et où le cinéma devient un lieu d’interaction entre art et biologie.
« Avant, pour stocker nos images et partager nos recettes, il y avait Internet ; mais le réseau se fait vieux, il se privatise à toute allure, et sa consommation d’énergie nous promet des lendemains qui chauffent.
Emilien Dubuc
L’ADN c’est l’avenir : son stockage ne requiert aucune énergie, et il se conserve pour l’éternité (50 ans m’auraient suffit). Mais cela coûte cher à synthétiser. Avec mon budget, j’ai de quoi stocker 200 ko de mémoire. Quels souvenirs choisir ? Et comment faire ?- Il n’existe pas encore de tuto. »
THE COSMIC MICROWAVES BACKGROUND de Robin Touchard
« The Cosmic MicroWaves Background » explore les frontières entre le micro et le macro à travers des objets banals tels que des machines à laver, cafetières, et imprimantes. Ces objets sont filmés dans des scènes où ils finissent par imploser ou exploser, avant de se fondre dans un univers cosmique en trois dimensions. Ce mélange d’éléments concrets et abstraits reflète l’idée que même les éléments les plus insignifiants de notre quotidien peuvent être le point de départ pour explorer l’univers à grande échelle.
Rôle pendant le tournage :
Assistance sur le plateau : J’ai aidé à la mise en place des objets, à leur manipulation pendant les scènes, et à la coordination entre les effets spéciaux et l’équipe technique pour capturer ces moments de transformation visuelle.
Participation : du 11 au 14 mars 2024
Mon intérêt pour ce projet portait sur les textures et mouvements générés par des appareils électroménagers et autres objets du quotidien, à une échelle imperceptible à l’œil humain. Aux côtés de Robin, j’ai observé sa façon de manipuler et de contraindre la matière artificielle, la forçant à se transformer. Cela m’a inspiré pour créer Mineworld, une pièce où j’expérimente la matière vivante pour obtenir une transformation artificielle : ponçage des couches de feuilles de roseaux, lumière interne, évoquant l’extractivisme de la surface terrestre.
Conclusion
Cette expérience enrichissante m’a permis de découvrir les étapes de réalisation de trois projets audiovisuels distincts et de mieux comprendre les défis auxquels les artistes sont confrontés lors du processus de conception et de production. Elle a également confirmé l’importance cruciale de la communication dans la création. Grâce à cette immersion, j’ai saisi l’engagement et le travail qu’exige un projet professionnel avec un budget précis. Les nombreux échanges avec Lou Chenivesse, Émilien Dubuc et Robin Touchard m’ont offert de précieuses références artistiques, inspirantes pour mes futurs projets autour de l’eau, la documentation, les données numériques et des expérimentations de la matière.
[ Toutes les images ont été réalisé par J. Daniel Junco durant les respectifs tournages. ]